Homélie du 18 février 2015 - Mercredi des Cendres
fr. Ludvik Grundman

«Souviens-toi que tu es poussière, et que tu retourneras à la poussière.» Quelle parole dure! Quelle parole désagréable! Quelle parole décourageante! Ce serait déjà difficile à entendre si elle ne s’adressait qu’à toi qui es là! Mais elle s’adresse à tous, à toutes les personnes que tu aimes et chéris. Toi, ta femme, ton mari, tes enfants, tes amis, ton pape, ton évêque, ton curé, ton confesseur, et même le prédicateur qui te parle avec ce bizarre accent tchèque… nous tous retournerons à la poussière!

Et pourtant… et pourtant, c’est une bonne nouvelle. Et cela au moins pour trois raisons:

Tout d’abord, parce que le Seigneur Lui-même «se souvient que poussière nous sommes» comme dit le psaume (Ps 102/103, 14). Et «il sait de quoi nous sommes pétris» (Ps 102/103, 14). Il connaît nos faiblesses, nos limites, nos difficultés et c’est pourquoi il est d’autant plus miséricordieux! «Il ne nous traite pas selon nos fautes, ne nous rend pas selon nos offenses.» (Ps 102/103, 10). Aussi grands soient nos fautes et nos péchés, la miséricorde divine les brûle par le feu de son amour et les réduit en poussière. Tout ce qui tu as commis ou pu commettre: «débauches, vols, meurtres, adultères, cupidités, méchancetés, ruse, impudicité, envie, diffamation, orgueil, déraison» (Mc 7, 21-22). Tout ce qui nous menace et qui te fait peur: les attentats, les guerres, crises et conflits, tout cela est grave, parfois très grave, mais devant Dieu et son immense miséricorde c’est comme rien (Cf. Is 40, 17), comme un tas de poussière.

«Tu es poussière, et tu retourneras à la poussière.» Mais tu n’es pas n’importe quelle poussière. Les molécules qui composent ton corps pourraient très bien faire partie d’une chose inanimée, qui n’a ni nom ni histoire. Or, toi, tu as un nom et une histoire unique! Dieu demande à Abraham: «quand pourra-t-on compter les grains de la poussière de la terre?» (Gn 13, 16). Eh bien, ce qu’Abraham ni aucun autre homme ne peut faire, Dieu le fait. Oui, il compte, il compte chaque grain de cette poussière que tu es! Il compte chaque cheveu qui tombe de ta tête! (Mt 10, 36) Tu es poussière, mais une poussière dont chaque grain est connu et chéri par Dieu!

«Tu es poussière, et tu retourneras à la poussière.» Certes, mais pas pour rester poussière. Dieu Lui-même nous a tirés une première fois de la poussière, lorsqu’il a créé Adam, et pour nous tirer de l’abîme du péché, il a pris notre chair de péché, (Rom 8,3) notre chair de poussière, pour nous délivrer. Jésus Christ a pris sa Croix, l’a traînée dans la poussière, Il s’est laissé écraser par elle jusqu’à s’effondrer dans la poussière, pour que toi, tu ne restes pas poussière, pour que toi, tu te relèves de la poussière pour une vie éternelle! (Dn 12, 2)