Homélie du 29 mai 2011 - 6e DP

De grâce en grâce.

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Le connaître et l’aimer, lui, Jésus-Christ le Seigneur, l’unique médiateur entre Dieu et les hommes, le connaître et l’aimer, et obéir à ses commandements, tel est le programme, le parcours de toute vie chrétienne sous la mouvance de l’Esprit qui accomplit en nous les œuvres de Dieu. Dans son dernier entretien avec ses disciples dont nous venons d’entendre un passage, Jésus le leur rappelle et leur fait cette promesse : il priera le Père et il leur donnera un autre Défenseur qui sera toujours avec eux, l’Esprit de vérité. Et il ajoute que « le monde ne peut le recevoir parce qu’il ne le connaît pas », alors qu’eux-mêmes le connaissent parce qu’il est auprès d’eux et qu’il est – et sera – en eux. Déjà l’Esprit est donc en œuvre dans leur intelligence et leur cœur, à la source de leur foi et de leur attachement à Jésus, mais il leur sera donné plus tard pour parfaire et dynamiser cette foi et cet amour. Il faudra attendre la Pentecôte pour que les Apôtres fragiles et timorés soient remplis de cette Énergie nouvelle qui en fera les témoins enthousiastes et courageux de la Bonne nouvelle.

Comment comprendre ce « déjà et pas encore » qui est au cœur du mystère du salut ? Peut-être la lecture des Actes des Apôtres que nous avons écoutée tout à l’heure pourrait-elle nous éclairer par un autre exemple. Ces Samaritains ont accueilli la parole de Dieu proclamée par le diacre Philippe, ils ont été baptisés au nom du Seigneur Jésus, mais l’Esprit Saint n’était pas encore venu sur eux. Ils avaient bien reçu la grâce du baptême – n’est-ce pas l’œuvre de l’Esprit ? – mais cette grâce avait besoin d’être confirmée par les Apôtres Pierre et Jean pour s’épanouir.

Il en est ainsi de toute vie chrétienne, et, comme Saint Augustin l’a si bien exposé : la grâce est toujours première et la préparation à la grâce est elle-même l’œuvre de la grâce. Cela veut dire que sans la grâce – la présence active en nous de l’Esprit de Dieu et par là-même du Père et du Fils – nul ne peut adhérer à Jésus-Christ et le reconnaître comme le Seigneur et « le seul saint » (1 P, 3,15). Mais l’œuvre de la grâce mystérieusement se développe « de grâce en grâce », « de foi en foi. » C’est pourquoi Jésus peut dire à ses disciples au futur ce qui, déjà présent, est encore et toujours à venir : « vous vivrez… celui qui m’aime sera aimé de mon Père… »

C’est à nous aujourd’hui que Jésus dit : « Je suis en mon Père, vous êtes en moi, et moi en vous. » Par la grâce de l’Esprit, Dieu habite en nous ! Et toujours davantage, à la mesure de notre fidélité à l’amour du Seigneur et à ses commandements. « Celui qui a reçu mes commandements et y reste fidèle, c’est celui-là qui m’aime ; et celui qui m’aime sera aimé de mon Père ; moi aussi je l’aimerai, et je me manifesterai à lui. » Malgré tout ce qui nous habite aussi et qui peut souvent prendre tant de place et nous faire dévier, malgré les tentations du monde et les sollicitations de l’Adversaire accusateur, il faudrait se laisser conduire par la grâce de l’Esprit Saint sur ce chemin de la fidélité et de l’amour qu’elle met au plus intime de notre cœur. Mais nous sommes, tous et toujours, des infirmes de la foi et de l’amour et de bien piètres témoins de l’espérance qui est en nous (cf. 1 P 3). On trébuche souvent, et parfois on tombe, bien bas peut-être, mais notre Défenseur, notre Consolateur est toujours là qui peut nous relever et faire de nos chutes mêmes un lieu de grâce à cause de Jésus qui est « mort pour nos péchés afin de nous introduire devant Dieu » : « Dans sa chair, il a été mis à mort ; dans l’esprit, il a été rendu à la vie ». C’est ce mystère de la Pâque victorieuse du péché et de la mort, que nous célébrons dans notre eucharistie et qui aujourd’hui renouvelle notre vie et nos forces par la communion au corps et au sang du Seigneur.