Homélie du 29 mars 1998 - 5e DC

Le Baptême : revêtir la puissance de Vie du Christ Ressuscité

par

fr. Rémy Bergeret

        Avec la Samaritaine, il y a 15 jours, le Fr. Joël évoquait l’éveil de notre désir, de notre soif de Dieu qui se traduit par l’amour-charité qui nous lie au Christ; avec l’aveugle-né, nous avons eu une fort belle catéchèse de la foi, de cette clarté nouvelle que le baptême va vous apporter sur le mystère du Christ. Eh bien, on peut dire qu’aujourd’hui, avec la résurrection de Lazare, nous abordons l’espérance: l’espérance en notre propre résurrection dont celle de Lazare est un signe avant-coureur, dont celle du Christ est la pleine réalisation.

        Signe puissant en effet parmi les nombreux miracles opérés par le Christ: il y avait eu l’eau changée en vin, la tempête apaisée, la multiplication des pains, l’expulsion des démons et les multiples guérisons physiques, le pardon des péchés, etc., mais ramener un mort à la vie, on comprend que cela ait frappé les esprits! Car Lazare est bien mort: nous sommes au quatrième jour, il sent déjà, c’est-à-dire que la décomposition a déjà commencé à faire son oeuvre sur son corps (symboliquement, le Christ, Lui, ressuscite le troisième jour, avant cette fatidique corruption du tombeau). Et Lazare n’était pas n’importe qui pour Jésus: à côté des douze disciples, Jésus avait des familles amies qui lui accordaient l’hospitalité et près de Jérusalem à Béthanie, il y avait Lazare et ses sœurs Marthe et Marie. C’était donc un ami proche. Ce qui explique la forte émotion de Jésus affronté à cette mort, une véritable épreuve au cœur des relations humaines qu’il a tissées sur cette terre. Et les gens ne s’y trompent pas en le voyant pleurer:  » Voyez comme il l’aimait « . Touche délicate de la grande humanité de notre Dieu qui se laisse saisir au cœur car il est riche en tendresse, en miséricorde. Nous tenons ici la motivation principale du signe accompli par le Christ. Mais l’énergie pour le faire, il va la puiser dans une prière directe au Père. Et là encore, Jésus ne joue pas au magicien, le signe n’est pas posé dans l’absolu: dans sa confiance d’être exaucé, il manifeste la finalité du geste  » afin qu’ils croient que tu m’as envoyé « . Le but visé, c’est bien la foi. Il confirme ainsi ce qu’il avait dit à ses disciples:  » Cette maladie n’aboutira pas à la mort, elle servira à la gloire de Dieu  » et encore  » Je suis heureux pour vous de n’avoir pas été là, afin que vous croyiez « .

        Mais croire en quoi, au juste? Au Christ, croire qu’il est le Fils de Dieu, Celui qui vient dans le monde, autrement dit l’envoyé du Père. Croire qu’il est la Résurrection et la Vie, sur sa parole sûre: Celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra.

        Or voici la nouveauté, chers catéchumènes: la foi, ce don de Dieu qui va être semé dans vos cœurs au baptême par la vertu de l’Esprit Saint, va devenir en vous principe, germe de vie éternelle. A ce propos, au delà du caractère spectaculaire de l’Évangile de ce jour, on devrait plutôt parler de réanimation dans le cas de Lazare, car il revient à la vie terrestre mais il mourra de nouveau, cette fois pour de bon, si j’ose dire. Cela dit, ce signe est annonciateur de la Résurrection du Christ, mais attention: le Christ mort et enseveli passe à une vie totalement autre dans la Résurrection et la puissance de vie déployée là par le Père est du même ordre que celle mise en oeuvre dans la Création aux origines: c’est une re-création. La foi va vous mettre en relation de réciprocité, solidarité communion profonde avec le Vivant – le Christ -: la sève qui va couler dans vos veines, ce sera l’Esprit et comme boisson désaltérante, vous aurez son sang qui est l’Amour incorruptible.

        Nous comprenons mieux, arrivés presque au terme de ce Carême en quoi le signe de Lazare vient faire écho à l’évangile des Tentations au Désert du 1er dimanche. Nous avions parlé alors d’une première victoire remportée par le Christ sur les forces du mal; aujourd’hui, il s’agit d’une autre victoire sur les forces de la mort qui prennent pour nous l’image des ténèbres. Oui, aveugles-nés, nous sommes bien des miraculés du baptême. Incorporés au Christ par le baptême, vous allez entrer dans un nouvel espace, celui des croyants, dont toutes les relations sont régies par leur rapport personnel au Vivant – le Christ. Et ainsi la course que représente notre vie chrétienne avec sa part de combat spirituel n’aboutit pas à un néant de type matérialiste; il est entraînement, engagement à la vraie vie qui ne finira pas: la vie avec Dieu, dans un face à face éternel.

        Catherine et James, éveillez-vous, ouvrez-vous à la vraie vie (ce sera le beau geste de l’Ephata tout à l’heure), le Psaume dit:  » Seigneur, ouvre mes lèvres et ma bouche publiera ta louange « . Oui, chers amis, ouvrez bien l’oreille de votre cœur pour pouvoir écouter, accueillir, recevoir la Parole de Vie. Alors vous serez d’authentiques disciples, des Témoins, HEUREUX. Amen.