Homélie du 7 août 2016 - 19e dimanche du T.O.

L’élu est serviteur

par

fr. Timothée Lagabrielle

Dieu choisit certaines personnes pour leur confier des missions particulières. Dieu institue des intendants à qui il confie des charges. Il fait des choix particuliers. Dieu appelle certains et pas les autres. «Est-ce pour nous que tu dis cette parabole?» demande saint Pierre. Et Jésus répond, par une autre parabole, que c’est bien d’abord pour ses plus proches qu’il parle aujourd’hui. Il y a donc des privilégiés.

Devant ces privilèges, ces choix particuliers de Dieu, il nous faut éviter deux mauvaises attitudes. L’une est d’être triste quand les autres sont choisis pour une mission particulière et que nous ne le sommes pas. L’autre est, quand nous sommes choisis, de n’avoir notre joie que dans le fait d’être choisis.

Comprenons bien les choses telles que Dieu les voit. Les privilèges nous choquent quand on voit qu’ils enlèvent à l’un ce qu’il devrait légitimement avoir afin de le donner à un autre sans que ce soit nécessaire. En effet, ceci est mauvais. Mais pour les privilèges divins, ça ne fonctionne pas ainsi. Pour Dieu, le privilège de l’un n’est pas la déchéance de l’autre. Au contraire.

Dieu est bon et généreux. Il veut déverser sa bonté. Il veut la communiquer à d’autres, notamment aux hommes, à nous. Et il ne veut pas cela en général. Dieu ne fait jamais les choses en général, mais toujours en particulier. Il veut communiquer sa bonté à chacun particulièrement. Et, plus que cela, il veut associer l’homme à cette communication de bonté. Il veut associer les hommes à son œuvre. Il choisit des hommes pour que sa volonté se fasse. Quand Dieu veut donner une grâce à quelqu’un, habituellement il la confie donc à un autre avec la mission de la transmettre. De cette façon il nous divinise, c’est-à-dire il nous rend semblable à lui dans la mesure où nous agissons comme lui et avec lui.

C’est pour cela que nous n’avons pas à être jaloux des privilèges et des choix particuliers de Dieu: le choix particulier d’une personne est toujours en vue des autres. Dieu béni celui qu’il choisit mais cette bénédiction n’est pas faite pour s’arrêter en lui. Elle est pour les autres, pour rayonner. Celui qui est choisi est toujours choisi pour une mission. L’élu de Dieu est toujours serviteur.

On le voit bien dans les grandes figures bibliques: Abraham en qui sont bénies toutes les familles de la terre; Moïse par qui la grâce vient sur tout le peuple, etc. Au plus haut point, on le voit avec Jésus. Ce maître qui se ceint pour servir ses serviteurs, c’est lui. Lui qui a lavé les pieds de ses disciples et qui continue à se mettre à notre service.

Il n’y a donc pas à s’attrister de ce que Dieu choisisse les autres pour des missions particulières, puisqu’en faisant cela c’est de nous qu’il prend soin.

Mais cela veut dire aussi que nous n’avons pas à mettre notre joie seulement dans le fait d’être choisi par Dieu. Vous vous souvenez, c’est la deuxième mauvaise attitude à éviter. Jésus ne proclame pas bienheureux celui qui est établi comme intendant, mais: «Heureux ces serviteurs-là que le maître, à son arrivée, trouvera en train de veiller.» La vraie joie n’est pas de recevoir une mission particulière, mais de répondre à cet appel, de faire la volonté de Dieu, de s’associer à l’œuvre qu’il veut faire. D’être un bon intendant qui transmet aux autres le secours ou les grâces que Dieu veut leur donner par moi. Car Dieu veut se servir de moi de cette façon.

Dieu a choisi chacun de nous pour des missions. La question n’est pas: «Est-ce que je suis choisi par Dieu pour une mission particulière?», mais: «Pour quoi Dieu me choisit-il?» Quel est ce bien qu’il veut faire par moi? De quel bien suis-je l’intendant? Quel est le trésor qu’il m’a confié et dont je suis le dispensateur?

Comment le savoir? Regardons ce que nous savons faire (ou ce que nous pouvons apprendre à faire), ce qui est à notre portée, et ce que Dieu voudrait donner à ces personnes autour de nous… et la réponse apparaitra d’elle-même.