Homélie du 3 avril 2010 - Vigile Pascale

Les nuits de Dieu sont plus belles que nos jours

par

fr. Olivier de Saint Martin

Les nuits de Dieu sont bien plus belles que nos jours. Avez-vous remarqué combien Dieu aime visiter la nuit pour la transfigurer?

Rappelez-vous: Lorsque les hébreux ployaient sous le joug de l’esclavage, le Seigneur a choisi une nuit pour leur dire qu’Il avait entendu le cri de leur détresse. Présent dans la nuée lumineuse, il a guidé son Peuple jusqu’à la Terre promise. Derrière ce signe, Dieu disait à son Peuple: si tu me suis, alors tu connaîtras que tu es fait pour une vie belle et grande sur la terre que je te donnerai.

C’est au cours d’une autre nuit que le Seigneur est né à Bethléem. Le signe qui fut donné à l’aube, ce n’était plus une terre mais un petit enfant. Dieu s’était uni à l’homme dans le Fils et disait à l’homme que sa vocation était de participer à la nature divine. Le Peuple avait alors espéré que Jésus serait le Messie. N’avait-il pas été un prophète puissant? Mais le Prince des Ténèbres avait eu son heure et Jésus était mort. La nuit semblait être à nouveau tombée en Israël. Or voici que Dieu a visité la nuit et a ressuscité son Fils. Et au matin, il y eut un signe: un tombeau vide. Et des anges qui disaient: pourquoi cherchez-vous parmi les morts celui qui est vivant. Il n’est pas ici! Pourquoi ce tombeau vide sinon pour nous obliger à chercher le Seigneur ailleurs? Mais quel ailleurs?

Aujourd’hui le monde n’en finit pas d’être la nuit: celles des guerres, des maladies, des injustices, de nos souffrances… Et si nous sommes ici, c’est peut-être parce que nous attendons que le Seigneur vienne illuminer notre nuit. Eh bien, réjouissez-vous: cette nuit est celle de Dieu. Son passage est peut-être silencieux mais il est bien réel! Et le tombeau vide nous redit que la réponse est maintenant à l’intérieur de notre cœur même s’il était dans l’obscurité. C’est cela que viennent de vivre Quentin et Lianna. Le Seigneur est venu habiter en eux et leur a dit à travers le baptême et la confirmation: Je suis maintenant pour toujours avec toi. Quelle que soit ta nuit, où que tu puisses tomber je serai là et te recueillerai. Je suis présent y compris au travers des portes de la mort, là où personne ne peut plus t’accompagner et où tu ne peux rien emporter, là je t’attends et je change pour toi la nuit en lumière. Et ces paroles valent pour chacun d’entre nous.

Quentin et Lianna, c’est une nouvelle vie qui vient de jaillir en vous. Cette vie éternelle demande à se déployer, à donner toute sa mesure: elle veut imprimer en votre corps et en votre cœur les traits du Christ ressuscité. Pour cela, il vous faudra la nourrir en particulier à travers le corps et le sang du Christ qui viendra ainsi ensemencer votre corps et votre sang. Dans l’eucharistie, Jésus se mêle à nous pour ne faire plus qu’un avec nous et que nous puissions dire: ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi. C’est bien pour cela que le tombeau est vide, c’est parce que le Seigneur est en train de réaliser sa promesse de venir à nous pour faire en nous sa demeure. Voilà votre vocation: donner au Seigneur ressuscité comme une humanité de surcroît. Vous devenez la présence du Christ au milieu d’un monde qui ne le voit pas.

Cette présence, c’est celle de l’Église, le Corps du Christ. Oh, je sais bien que la situation de l’Église n’est pas très flamboyante. N’oubliez pas pourtant que quels que soient sa situation, ses problèmes ou encore les péchés de ses membres, l’Église est le cœur du monde. C’est en elle et par elle que le Christ vit! Et si elle reçoit sa vie du Christ, c’est par vous, par nous qu’elle vit. Tous, néophytes ou vieux baptisés, nous sommes tournés non pas vers un monde imaginaire, mais vers un monde réel, vers la Vérité que nous portons désormais au plus profond de nous-mêmes le Christ ressuscité. En cette nuit nous venons tous de renaître.

Au début de la célébration, je voyais vos visages, illuminés par les cierges que vous teniez. La flamme qui éclairait votre visage provenait du cierge pascal et cela donnait à chacun une beauté unique. C’est le Christ qui ainsi vous illuminait. Et lorsque vous teniez votre cierge et le leviez comme un signe de victoire, vous étiez porteurs du Ressuscité et vous projetiez autour de vous sa victoire. Il n’y avait plus de ténèbres, plus de nuit, mais une lumière que vous portiez et transmettiez autour de vous en la chantant. On découvrait, en vous voyant, les germes de la Résurrection, des germes de lumière, de vie, de pardon et de paix. Vous ne pouviez le voir, mais moi je l’ai vu. Et je l’ai encore vu pendant l’évangile! Au sortir de cette nuit, il faudra garder ce trésor et le transmettre!

Ce trésor, c’est la Pâque du Christ. C’est notre joie, notre identité! Cette Pâque, elle est en nous pour que nous la transmettions autour de nous, que nous devenions cette lumière du monde et ce sel de la terre qui réconfortent les cœurs fatigués en leur redonnant le goût de l’amour, de la vérité et de la vie. En cette nuit de Pâque, laissons-nous prendre par la vie de Dieu, par la vie du Christ ressuscité, laissons-nous envahir par cet amour vrai. Et nous prions: C’était donc vrai! Tu nous a sauvés et, par ta résurrection, tu fais de nous tes fils. Seigneur, fais que nous devenions des personnes pascales, des fils de la lumière, remplis du feu de ton amour.

Amen.