Homélie du 4 juillet 2010 - 14e DO
fr. Renaud Silly

Nous avons tous vu, au moins en reproduction, la fresque de Michel-Ange dans la chapelle Sixtine qui montre la création de l’homme: le Père étend son bras droit au point d’atteindre presque le doigt d’Adam tendu vers lui et couché sur le sol; le Père semble tourner la tête; en effet, il n’a pas besoin de nous pour être heureux, il jouit d’une éternité de délices dans le partage de la vie trinitaire avec le Fils dans l’Esprit. Sa bienveillance envers nous procède de sa seule volonté de nous faire du bien. Adam à l’inverse a le regard dirigé sur Dieu, ‘Vers toi j’ai les yeux levés, qui te tiens au ciel; les voici comme les yeux des serviteurs vers la main de leur maître‘ car il n’y a que de Dieu qu’il puisse espérer la vie, la croissance et l’être. d’un côté, l’énergie et la vie, de l’autre, l’attente et la confiance. Michel-Ange a voulu ainsi représenter cette énigmatique phrase de la Genèse où Dieu insuffle un esprit de vie en Adam, le fait passer de l’état d’une argile sans vie à un corps animé. À la Sixtine, l’Esprit est figuré non par le souffle mais par le doigt; l’Esprit est en effet brise légère, haleine de vie, vent de fraîcheur, zéphyr suave; mais il est encore puissance, activité sans relâche.

Dieu a les yeux ouverts sur le monde pour nous signifier que rien de ce qui se produit dans l’univers ne lui demeure inconnu; Dieu a des oreilles pour entendre la prière quand il veut consoler et faire grâce; mais il a aussi un bras dans la puissance ne saurait jamais être mise en défaut.

Il est certainement important de rappeler cela au moment où Jésus envoie ses ministres au-devant de lui. Si leur mission est fructueuse, c’est parce qu’il s’appuient sur la toute-puissance de Dieu. ‘Seigneur, même les démons nous sont soumis en ton nom‘; c’est comme la mise en application de ce que Jésus dit ailleurs: ‘si c’est par le doigt de Dieu que j’expulse les démons, c’est que le royaume de Dieu est arrivé jusqu’à vous‘; d’ailleurs chez Mt: ‘si c’est par l’Esprit de Dieu que j’expulse les démons‘. il ne sert à rien de s’appesantir sur les faiblesses des ministres de l’Église.

Les consignes que Jésus donne aux disciples qu’il envoie ne relèvent pas d’abord de la stratégie missionnaire, mais de la proclamation de la présence de Dieu qui se réalise par leur envoi en mission. Jésus lorsqu’il envoie ses disciples n’est pas le stratège génial d’une start-up promise à un brillant avenir, mais un prophète qui déclare la présence vivifiante de Dieu dans le monde.

Paix à cette Maison’; c’est la paix que Jésus donne et que le monde ne peut donner, la paix de ceux qui vivent de l’Esprit des Béatitudes ‘heureux les pacifiques, car ils seront appelés Fils de Dieu‘. ‘Je vois Satan tomber du ciel comme l’éclair‘. Dites aux gens: ‘le royaume de Dieu est tout proche de vous‘. il vient, il frappe à la porte, il entre chez nous pour souper. C’est l’âme de tout apostolat: lorsque la prédication est une visite du Seigneur. ‘je vous dis que, pour Sodome, il y aura en ce jour-là moins de rigueur que pour cette ville‘. (agneaux au milieu de loups: Isaiah 65:25 Le loup et l’agnelet paîtront ensemble).

Ainsi la proclamation de l’Évangile baigne une atmosphère de miracle et de démonstrations de puissance: ‘une seule est la foi, mais son genre est double: il existe une fois concernant les dogmes, c’est la connaissance et l’adhésion intellectuelle aux vérités révélées; cette foi est nécessaire au salut ? mais il existe un autre genre de foi qui est un don du Christ: ‘À l’un, c’est un discours de sagesse qui est donné par l’Esprit; à tel autre un discours de science, selon le même Esprit; à un autre la foi, dans le même Esprit; à tel autre les dons de guérisons, dans l’unique Esprit‘; cette foi, donnée par l’Esprit comme un don, fait partie de ces démonstrations de puissance qui accompagne la prédication de l’Évangile; chaque foi que nous posons un acte de foi, c’est un don charismatique que Dieu nous fait, un moment de présence concentrée de l’Esprit Saint. Cette foi est une cause de prodiges, qui dépassent toutes les forces humaines. Celui qui possède cette foi pourra dire à cette montagne: ‘déplace-toi et elle se déplacera.’

Pourquoi en va-t-il ainsi?

Lessing a proposé une démonstration qui permet de comprendre le rôle permanent du miracle dans le christianisme. On ne pourra jamais donner une démonstration rationnelle et définitive de la vérité de l’Évangile (Cantalamessa Viens Esprit Créateur p.167); en effet, des vérités historiques et occasionnelles ne pourront jamais prouver des nécessaires vérités de raison. Événement particulier de l’histoire, la prédication de Jésus court le risque de s’enfermer dans un moment particulier de l’histoire sans lendemain. La seule preuve manifeste et convaincante de la vérité de la foi est la manifestation de puissance divine qui agit dans les miracles et les signes prodigieux. C’est pourquoi le christianisme aurait besoin à chaque époque de signes et de prodiges, de démonstrations de vérité et de puissance.

Ce qui manque à Lessing, c’est le fait que l’Église est toujours inspirée par Dieu , et que d’autre part la foi des chrétiens, indépendamment des miracles, repose non sur leur conviction intime mais sur le témoignage intérieur et habituel de l’Esprit saint. Cela n’empêche que le Seigneur nous montre la prédication accompagnée de signes de puissance

Les charismes dans la vie de l’Église

C’est ce dont nous avons le plus besoin dans notre service du royaume: la puissance et l’efficacité surnaturelle. Ce qui a poussé bon nombre de prêtres à désirer la grâce d’une nouvelle Pentecôte, c’est le constat de leur impuissance due à l’absence de cette puissance promise par Jésus à ses disciples: ‘vous allez recevoir une force, celle de l’Esprit saint, qui descendra sur vous‘. L’invocation de la toute-puissance de Dieu et la foi en elle est absolument nécessaire dans tout apostolat. C’est elle qui est figurée par ce doigt de Dieu que nous contemplions tout d’abord. On pourrait comparer les faits merveilleux qui confortent notre foi à ces notes aiguës, la multitude de nos actes habituels de foi à ces basses profondes.

Les démonstrations de puissance, témoignages, pèlerinage, ascèse exceptionnelle etc . sont comme les notes aiguës d’une harmonie: ce sont elles que l’on entend le plus, que l’on remarque tout de suite. Mais pourtant, ils ne sont beaux et ne tire leur profondeur que des notes basses, à peine audibles, qui leur confère une portée plus grande.

L’Église a le même problème que le monde, à savoir l’énergie: comment garantir l’énergie nécessaire à notre vie? Où puiser cette énergie? D’en-bas ou d’en-haut? En ce qui concerne l’énergie physique, on sait que le pétrole n’est pas inépuisable et que son exploitation entraîne toutes sortes de pollutions: on cherche donc à le remplacer par l’énergie solaire, qui vient d’en-haut. L’énergie qui arrive sur la terre sous forme de lumière est 12000 fois supérieure à celle qui est issue de la consommation mondiale de combustibles: la force d’en-haut est inépuisable, propre, infiniment plus puissante que celle d’en-bas, au point qu’il n’y a aucune mesure entre elles. En pourtant, nous la gaspillons, nous nous plaignons quand il fait trop chaud, sans songer à tirer parti de ce don merveilleux. Choisirons nous l’énergie d’en-haut ou celle d’en-bas?

Dans le domaine spirituel, nous sommes devant le même choix: chercher notre énergie en-bas, dans nos ressources intellectuelles, ou dans notre esprit d’initiative; où bien la chercher en-haut, dans le soleil de justice qu’est le Christ ressuscité.

Touchons ce doigt de Dieu qui se tendit à l’origine vers Adam: il continue à se tendre dans l’Esprit Saint qui nous communique la force qui émane du Ressuscité. Non pas seulement la force de la création, mais la puissance de la rédemption. ‘porte ici ton doigt, avance ta main et mets la dans mon côté‘. en touchant Jésus, il reçoit une force si puissance que tous ses doutes ne pèsent plus rien et se volatilisent. C’est ce toucher du soir de Pâques que l’Esprit exerce aujourd’hui dans l’Église.

Voilà donc comment il faut entendre les recommandations que Jésus donne à ses disciples: non pas des stratagèmes, mais des manifestations de puissance qui accompagnent la prédication.

Ainsi: n’emportez pas de bourse: pas d’argent: soyez pauvre car c’est à eux qu’appartient le royaume.

N’ayez pas de besace: car les chastes sont ceux qui ont renoncé à l’usage légitime des biens terrestres, qui mortifient leurs appétits afin de creuser en eux le désir de Dieu.

N’ayez pas de sandales: ainsi faisait Moïse; invité à enlever ses chaussures car le lieu où il est est une terre sainte; mets-toi à nous devant ton Dieu, qui puisse te toucher directement (cf. les gants percées des évêques qui ordonnent des prêtres). Nu devant Dieu, tu est alors transparent à sa grâce pour qu’il te touche et fasse de toi un instrument de choix. Alors il est apte à sa mission, obéissant à ce que Dieu lui demande.

Si l’on avait assisté à une seule confession, il y aurait beaucoup plus de jeunes qui voudraient devenir prêtres.

– Pour les couples qui se marient en ce moment nous te prions Seigneur; qu’ils constituent un témoignage de fidélité, d’amour et de respect mutuel pour la société dans laquelle ils vivent et que l’affection conjugale leur apporte le soutien dans tous les moments de l’existence.

– pour ceux qui ont été ordonnés prêtres en cette saison, et spécialement pour nos frères Vincent, Albert-Diempéclo et Lukasz, nous te prions Seigneur; qu’ils veillent à célébrer fidèlement les mystères pour leur sanctification et celle du peuple auquel ils sont envoyés.

– nous te prions Seigneur pour ceux qui ne te demandent rien; éclaire leur cœur sur ce qui leur manque; envoie l’Esprit qui dissipe l’incroyance; fais savoir à tous les hommes qu’il n’y a d’autre espérance que dans l’amour du Christ.