Frères et Sœurs, chers Nathalie, Maxime, Théodore et Romain,
Chaque année, nous sommes confrontés en cette Nuit Pascale au Tombeau vide, symbole paradoxal de la Résurrection du Christ et cette année encore nous avons la grâce de vivre en même temps un baptême d’adultes. Alors comment ont-ils reçu (ces quatre baptisés) ce signe singulier qui manifeste que le Christ Ressuscité est désormais partout présent et qu’Il a pu les rejoindre aujourd’hui? Qu’est-ce qui les a fait courir vers le baptême, quelle cause les a ainsi motivé? Eh bien, au fil de ce qu’ils nous ont confié, je crois pouvoir vous le dire, c’est de l’ordre du besoin, de la faim.
En cela, ils sont à l’image de notre humanité, de leur génération: affamés de sens, de valeur et de Dieu. Oui, les uns et les autres ont découvert progressivement qu’ils avaient besoin de la présence du Ressuscité dans leur vie, besoin de la lumière de sa Parole pour s’orienter dans l’existence; qu’ils étaient appelés à emprunter une route de bonheur à la suite du Christ, que Dieu les avait créé à son image et ressemblance pour aimer et être aimés, en bref, que ce désir de Dieu était inscrit dans leurs cœurs.
Et nous, frères et sœurs – les vieux baptisés – sommes-nous bien convaincus aussi de cela?
Face à cette donnée première – le caractère sacré, religieux de tout être humain et son aptitude universelle à la spiritualité – on peut évidemment s’interroger devant le climat ambiant d’indifférence au regard des réalités d’en-haut. Mais attention! frères et sœurs, une chose est d’avoir la potentialité, la faculté, cette «capax Dei» donnée à tout homme; une autre, de s’en servir, de la mettre en exercice concrètement. Le passage exige souvent un déclencheur. Pour l’un de ces nouveaux baptisés, une phrase du Pape aux Journées Mondiales de la Jeunesse en 97 a fait fonction de catalyseur décisif, dans une attente qui sommeillait sans doute depuis longtemps. Pour d’autres, une évidence les a saisi, une nécessité impérieuse de rejoindre le peuple des chrétiens: c’est le moment de le faire et de s’engager.
Donc, après avoir fait l’expérience de l’absence de Dieu, nos quatre baptisés ont réalisé un jour qu’être chrétien n’est pas une tare et qu’il n’y a pas de honte à prendre le train en marche. Et puis, du manque un peu négatif, on passe soudain à l’envie positive, car bien sûr quand on rencontre des chrétiens heureux à cause de leur foi, cela pose question: si eux le sont, pourquoi pas nous? Et cette envie ne relève pas du caprice ponctuel; elle est élan vital et va de pair avec un besoin de cohérence, d’ordre, de silence intérieur et de paix avec soi. Et c’est vrai que la foi au Dieu Créateur ne se satisfait pas seulement des explications de la mécanique céleste, de l’astronomie récente ou même de l’Évolution. La Bible, l’Ecriture révélée projette une autre Lumière, complémentaire parce que cette Lumière est porteuse de signification et de finalité. Oui, je peux vous l’assurer: ces quatre baptisés ont faim de la Parole de Dieu et ils y ont déjà mordu à pleines dents depuis deux ans. Et nous frères et sœurs – les vieux baptisés – sommes-nous toujours tenaillés par cette faim-là s’il est vrai que l’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu?
Et la Parole s’est faite Pain, le Verbe s’est fait chair. Ils ont tout autant faim du Corps du Christ et je peux témoigner de l’épreuve douloureuse de ces derniers mois, car c’est dur d’assister à la messe sans pouvoir communier: tout d’un coup, on se sent très seul à son banc, alors que les autres partent en procession. Et nous, frères et sœurs – les vieux baptisés – sommes-nous encore, vraiment affamés de l’Eucharistie? Aujourd’hui, ces baptisés s’approchent des sacrements comme de ce qui est essentiel dans l’Eglise, le plus utile. Commune à ces deux faims (de la Parole et du Corps), il y a je pense à la racine la faim de la présence du Ressuscité, car tout de même ce Christ Jésus, Il n’est pas comme tout le monde; ce Créateur, il a du génie, il n’y a que Dieu qui peut faire ça / Quant à l’Esprit Saint, il est l’Amour.
C’est ainsi, frères et sœurs, que le baptême de Nathalie, Maxime, Théodore et Romain actualise ici et maintenant la puissance de Vie de la Résurrection du Christ. Et pour accéder pleinement à la présence du Ressuscité, encore fallait-il passer par une Porte: cette porte sur un monde de Lumière, c’est le baptême et cette porte, chers amis, vous l’avez franchie. Vous avez été introduits dans la salle des Noces où tout est prêt pour le Banquet. Voyez, la Table est dressée et tout à l’heure, avec Martin, vous recevrez pour la première fois le Pain de Vie. A ce moment-là, goûtez comme est bon le Seigneur et soyez toujours joyeux en Sa Présence. Amen.