Homélie du 6 mai 2001 - 4e DP

Entendre Sa Voix

par

fr. Élie-Pascal Épinoux

Il y eut alors la fête de la Dédicace à Jérusalem. Jésus allait et venait dans le Temple sous le portique de Salomon (Jn 10,22-23).

et là, Il enseigne trois vérités sur les brebis de son troupeau

Première vérité: qui sont les brebis de son troupeau? « Mes brebis entendent Ma voix »

ce qui définit l’être de la brebis du Seigneur, c’est sa capacité à entendre la voix du Seigneur,

dans cette expérience, elle découvre qu’Il la connaît, lien personnel, intime, unique et amoureux.

Deuxième vérité: que font les brebis de son troupeau? « Elles Me suivent »

ce qui caractérise l’agir de la brebis du Seigneur, c’est sa capacité à se laisser guider par le Seigneur,

dans cette expérience, elle découvre qu’Il lui donne la vie éternelle passage de la haine à l’amour, de la mort à la vie.

Troisième vérité: qu’advient-il des brebis de son Troupeau? « Elles ne se perdront jamais »

ce qui distingue le devenir de la brebis du Seigneur, c’est sa capacité à l’espérance,

dans cette expérience, elle découvre qu’elle est dans Sa main, unie à Lui d’une union telle que rien ni personne pas même la mort ne pourra défaire.

La séquence est magnifique, l’enchaînement parfait, le terme grandiose!

Mais toute la question est: comment entendre la voix du Seigneur?

Jésus dans l’Évangile ne répond jamais à cette question, Il constate:

«les brebis le suivent parce qu’elles savent sa voix» (Jn 10,4)

« Mes brebis entendent Ma voix » (Jn 10,27)

ce qui semble renvoyer toute la responsabilité du côté des brebis…

Mais tout d’abord: qu’est-ce qu’entendre la voix du Seigneur? est-ce simplement synonyme d’écouter ses paroles?

«C’est au grand jour que j’ai parlé au monde. J’ai toujours enseigné en synagogue et dans le Temple là où s’assemblent les Juifs. Je n’ai rien dit en secret» (Jn 18,20).

Jésus s’est adressé à tous et à toutes ouvertement, il n’a refusé à personne Sa Parole:

du pharisien Nicodème à la femme Samaritaine, des disciples du Baptiste au fonctionnaire royal,

aux scribes et aux prêtres comme au paralytique et à l’aveugle, et même au mort!

et pourtant, à chaque parole, après chaque discours, il y a ceux qui entendent Sa voix, qui croient et dont la vie basculent, et il y a ceux qui n’entendent pas et s’en vont:

«Après l’avoir entendu beaucoup de ses disciples dirent: elle est dure cette parole qui peut l’écouter?
_ … dès lors beaucoup de ses disciples se retirèrent et ils n’allaient plus avec lui
» (Jn 6,60.66).

Mais qui sont ceux qui entendent et ceux qui n’entendent pas? Y a-t-il un critère de discernement?

ceux qui entendent la Voix du Seigneur sont des êtres en quête de quelqu’un ou de quelque chose:

– les premiers disciples au Jourdain, Nicodème ou Thomas, sont en quête du Messie, de leur maître

celui qui comblera l’attente de leur âme

– la Samaritaine, Marthe et Marie, Marie-Madeleine sont en quête d’un amour, de l’Ami

celui qui comblera le désir de leur cœur

– le fonctionnaire royal, le paralytique et l’aveugle-né sont en quête d’un médecin miraculeux

celui qui comblera l’attente des corps souffrants

et Lazare, le mort, il est en quête de la vie, ce qui résume et rassemble toutes ces attentes

ces hommes et ces femmes sont en situation d’insatisfaction qu’ils laissent plus ou moins ouverte à l’imprévu, ce qui semble les mettre dans un état de réceptivité plus ou moins grande

fulgurant chez Madeleine ou Thomas qui se retourne en un mot

plus lent au fil du dialogue pour Nicodème ou la Samaritaine

ceux qui n’entendent pas sont des êtres qui ne sont en quête de rien, parce qu’ils croient détenir de quoi satisfaire leur désir, ou ont enfermé leur attente dans un fantasme préconçu

les Pharisiens repus d’Écriture pour qui le Messie ne peut guérir le jour du Sabbat

Judas qui vend ce Maître incapable de faire ce qu’on attend de lui

Anne et Caïphe les grands prêtres maîtres du sacré qui n’ont rien à faire d’un Fils de Dieu en circulation libre

Pilate qui sait qu’en politique il vaut mieux éviter la vérité

ceux-là sont en situation de satisfaction, ils s’auto-suffisent, ils sont sourds parce qu’ils sont pleins.

Alors comment entendre la Voix du Seigneur?

En fait le grand spécialiste de la question, l’Entendeur nous a déjà été envoyé.

L’avons-nous reconnu, nous sommes-nous mis à son école, lui qui nous dit:

«L’ami de l’Époux qui se tient là et qui entend sa voix est ravi de joie à la voix de l’Époux. Telle est ma joie et elle est complète» (Jn 3,29).

Jean le Précurseur a volontairement placé sa vie en situation extrême pour se préparer et entendre la voix du Seigneur: silence de l’âme dans la prière; silence du cœur dans la solitude; silence du corps dans le jeûne; libre de toute idée pré-conçue: «et moi je ne le savais pas» (Jn 1,31-33)

n’était-ce pas là le véritable enjeu de notre carême? nous affranchir de toutes les auto-suffisances de l’âme, du cœur et du corps, éprouver le manque, retrouver le désir, en un mot, nous remettre en état d’entendre la Voix de l’Époux à travers les mots de Son Évangile, le silence de Son Corps, le visage de ses frères…

Au milieu de la nuit, un cri s’est fait entendre: Voici l’Époux qui vient! Allons à sa rencontre.

Oui, l’Époux, le Berger est là qui nous appelle chacun par notre nom, laissons-nous envahir par Sa Voix

récoltons dans la joie ce que nous avons semé dans les larmes:

« Mes brebis entendent ma voix Je les connais
_ Elles me suivent Je leur donne la vie éternelle

Elles ne se perdront jamais
_ Nul ne les arrachera de ma main
».

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