Homélie du 18 septembre 2016 - 25e dimanche du T.O.

Le mafieux et le vrai bien

par

fr. François Le Hégaret

Prendre comme modèle un homme truand sur les bords, voilà qui n’est pas banal chez Jésus. Ne pensez pas que l’exemple pris par Jésus soit totalement irréel: imaginez cet intendant comme un ancien ministre qui aurait fait l’objet de nombreux articles de presse récemment, qui aurait détourné des fonds pour lui-même certainement, mais aussi pour des amis, et vous aurez une figure bien concrète de notre intendant de l’Évangile. Bien, c’est lui que Jésus prend comme exemple. Bon, il y a des raisons pour qu’on trouve l’enseignement un peu osé. Mais attardons-nous justement sur l’enseignement de Jésus. Jésus ne dit pas que cet homme est bon, qu’il a fait le bien en tout. Il dit plutôt l’inverse. Jésus le décrit comme paresseux (il ne veut pas travailler), orgueilleux (il ne veut pas mendier car il aurait honte). Il n’a pas honte par contre de voler, et c’est pourquoi il va escroquer son employeur. Jésus l’appelle «intendant malhonnête»: le terme «malhonnête» qu’il emploie est le terme grec adikia, un de ces nombreux mots qui désignent le péché dans l’Écriture. Enfin, Jésus le met dans la catégorie des «fils de ce monde», face à la catégorie des «fils de la lumière». Il ne fait pas parti des personnes illuminées par la grâce du Christ. Pour ces raisons, heureusement pour nous, la parabole n’est pas un appel à devenir mafieux.

Qu’a-t-il donc fait pour recevoir un tel jugement? On ne sait pas, ce n’est pas rapporté ici. Mais en d’autre parabole, on voit cet intendant enfouir le talent qu’il a reçu dans la terre pour le redonner intacte à son maître. On le voit manger et frapper les serviteurs car son maître tarde à rentrer. Donc, soit il refuse d’utiliser les biens qu’il a reçus, soit il les utilise pour son propre plaisir malsain. C’est quand il va être renvoyé, quand l’argent vient à manquer, qu’il va changer de vie. Il y est contraint, c’est sûr. Mais Jésus le loue pour cela: il va se servir de l’argent, des biens de son maître, pour se faire des amis. Il s’est servi abondamment des biens de son maître pour diminuer les dettes des autres. Il a participé à la générosité de Dieu qui veut remettre les dettes à chacun. Il a été à l’image du père qui pardonne tout à son fils qui revient vers lui (c’est la parabole qui précède juste notre passage). Et ici Jésus le prend comme exemple pour tous les disciples, pour qu’ils fassent de même.

Après l’intendant malhonnête, Jésus passe à la source même de son péché: l’argent, qualifié aussi de malhonnête. Il est même quasiment présenté par Jésus comme un rival, un opposé de Dieu. Bon, qu’un homme puisse être malhonnête, on peut le comprendre; mais comment une chose, comme l’argent, peut-elle être malhonnête? Jésus serait-il tout simplement contre l’argent? D’autres passages de l’évangile montrent que cela n’est pas le cas. La pièce d’argent sert même à illustrer l’amour miséricordieux de Dieu à notre égard: c’est la parabole de la femme qui a perdu une de ses dix pièces et qui la retrouve avec joie. Mais si Jésus a qualifié de malhonnête l’argent, comme il a qualifié de malhonnête l’intendant: l’intendant n’agit pas comme il le devrait; l’argent ne peut donner ce qu’il semble permettre. Et pourtant beaucoup se laisse séduire par lui.

Le Christ nous indique donc deux voies pour rechercher le bien. Soit nous nous attachons à Dieu, au Bien véritable. Alors nous nous détacherons de tout ce qui n’est pas ce bien véritable: nous pourrons utiliser les autres choses comme l’argent, mais nous ne l’utiliserons que pour manifester la grandeur et la miséricorde de Dieu (c’est la manière honnête d’utiliser l’argent pour Jésus). Attachés à Dieu, détachés des autres biens, nous serons alors plein de Dieu. Soit nous nous attachons au bien immédiat qu’apporte l’argent, qui n’est qu’un bien apparent, et alors nous en voudrons toujours plus, nous ne serons jamais rassasiés. Attachés à l’argent, nous n’aurons plus de place pour Dieu. Et jamais nous ne pourrons obtenir le Bien véritable. Jésus nous appelle donc à nous détacher de tout ce qui nous retient d’accomplir notre véritable bien. Le premier détachement est celui de l’argent, c’est le plus simple à voir, c’est aussi un des plus difficiles à réaliser. Mais il n’est que le premier, Jésus nous appelle à faire ensuite d’autre détachement, jusqu’à notre propre vie. Recevoir notre véritable bien, qui est Dieu, est à ce prix. Alors, contrairement à cet intendant malhonnête de la parabole, n’attendons pas d’être obligé par les événements extérieurs pour nous tourner vers notre bien véritable. Dès à présent, Dieu se donne à nous, et il ne peut se donner à moitié. Accueillons-le donc totalement.

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