Homélie du 20 janvier 2013 - 2e DO

Les Noces de Cana

par

fr. Arnaud Blunat

«Le 3ème jour il y eut des noces à Cana de Galilée». L’évangile de Jean nous présente ainsi le premier signe que Jésus accomplit au cours d’un repas de noces. D’après les spécialistes, la localisation de Cana est incertaine. Mais nous savons que la Galilée est une terre où se côtoient juifs et païens. Elle préfigure la terre où tous les hommes sont appelés à vivre ensemble. Le temps indiqué, le 3ème jour, mérite une réflexion. Comment ne pas penser à la Résurrection de Jésus? L’inclusion est évidente. Ce premier signe par lequel Jésus manifeste sa gloire nous renvoie à son dernier signe: celui de sa Pâque, son passage de ce monde à son Père, sa mort-résurrection. Mais si nous regardons attentivement ce qui s’est passé juste avant l’épisode de Cana, nous comprenons que le 3ème jour dont parle Jean est en fait le 7ème jour. Jean situe l’avènement de Jésus dans une semaine inaugurale dont nous suivons le déroulement des quatre premières journées, ponctuées chaque fois par l’expression «le lendemain»: 1er jour: Jean Baptiste annonce la venue imminente du Messie. 2ème jour: il atteste que Jésus est le Messie, l’Agneau de Dieu, et témoigne de son baptême dans le Jourdain. 3ème et 4ème jours: Jésus appelle ses premiers disciples. Puis Jean enchaîne avec le récit des noces en disant simplement «le 3ème jour il y eut des noces à Cana de Galilée». 7 jours viennent de s’écouler comme les 7 jours de la création. Or le 7ème jour, Dieu s’est reposé de toutes ses œuvres. Il associe à sa louange l’homme et la femme qu’il vient de créer. Il partage avec eux la joie du Royaume qu’il a préparé pour eux de toute éternité. L’événement qui conclue cette entrée de Jésus dans le monde symbolise donc ce que Dieu veut réaliser en son Fils Jésus. Celui-ci est venu pour célébrer les noces de Dieu avec l’humanité en l’épousant sur la croix et la faisant entrer dans la lumière de sa résurrection.

Au commencement de sa mission parmi les hommes il est présent à Cana avec Marie sa mère et ses premiers disciples. Jean ne précise pas qui sont les époux de la noce mais nous comprenons désormais que le véritable Époux, c’est bien lui, Jésus. L’épouse, c’est l’Église, c’est bien nous. Le vin de la noce vient à manquer car la première alliance s’est épuisée. Plus de prophétie, plus de manifestation de Dieu. Mais avec la venue de Jésus, le ciel s’ouvre à nouveau, l’Esprit descend et repose sur lui, la voix du Père se fait entendre. Marie n’a plus qu’à dire aux serviteurs: «faites tout ce qu’il vous dira». L’eau se change en vin et le vin coule désormais en surabondance. Le côté du Christ a été ouvert pour que tous les hommes soient sauvés. La source du pardon ne se refermera plus. L’Amour de Dieu s’étend à jamais sur tous les hommes qui espèrent en lui. Le témoignage du maître du repas anticipe celui de l’Évangéliste qui a vu le côté transpercé ou encore la confession de foi du centurion. Celui qui a su garder le bon vin offrira aux pécheurs le don de son amour miséricordieux. C’est vraiment Lui le Fils de Dieu qui est venu pour libérer les hommes de leurs péchés et leur rouvrir les portes du paradis. Heureux les invités au banquet des noces éternelles de l’Agneau!

Frères et sœurs, depuis lors, l’Église qui a été sauvée par la mort et la résurrection de Jésus, est animée d’une espérance qui l’aidera à traverser toutes les épreuves jusqu’au retour de Jésus dans sa gloire. En lui Dieu est venu pour nous épouser, car, comme le dit Isaïe, nous sommes une couronne resplendissante entre ses doigts, un diadème royal entre ses mains. Il nous a parés de tous les dons de son Amour. Il nous a revêtus de son Esprit, il nous fait déjà gouter la joie du Royaume et nous réjouit par sa présence permanente. Tout ce que nous aurons dans l’éternité, nous y avons déjà part sous forme de prémices. Dans ces temps difficiles que nous vivons, dans cette période où l’Église est attaquée, mise en cause, dénigrée, comment tenir sans l’assurance que nous sommes déjà ressuscités avec le Christ et promis à sa Gloire? Comment vivre sur cette terre si la joie n’est plus au rendez-vous? Or les hommes vivent sur leurs dernières réserves. Ils ne veulent pas reconnaître que leurs outres sont vides, que leur joie est dénaturée par tant d’injustices et de mensonges, tant d’illusions de pouvoir et de prospérité, de caricatures de liberté, d’égalité et de fraternité, de faux semblants de paix et d’unité. Nous avons quant à nous l’audace de croire que dans son amour, Dieu a le pouvoir de nous rassembler, que l’unité, pour laquelle nous prions aujourd’hui, sera un jour possible. C’est dans le Christ seul qu’elle se fera parce que lui seul peut nous unifier dans la foi. Que tous soient Un et le monde croira! Puissions-nous garder la joie et l’espérance, et progresser dans cette unité dans le Christ, pour que nos différences ne soient plus des armes de discorde mais des richesses à partager, pour que de nos divisions extérieures et intérieures nous puissions renaître et ressusciter!