« Sur le chemin, il y a encore du chemin. » Cette parole m’habite en cette Semaine de prière pour l’unité des chrétiens. L’unité des chrétiens fut une grande espérance du Concile œcuménique Vatican II qui reprenait avec force un souci présent dans les précédents conciles. Les Pères conciliaires ont ouvert un chemin de fraternité pour que cesse la division des chrétiens et abolir les actes de méfiance, de mépris, de médisance et de violence posés par les chrétiens entre eux. Cette démarche avait deux sources. La première était le souci de la Mission : comment annoncer l’évangile d’amour et de fraternité quand on s’oppose, parfois avec violence, à ses frères et sœurs baptisés dans la mort et la résurrection du Christ ? La seconde motivation est plus spirituelle : l’Église est le « corps du Christ ». Comment accepter que celles et ceux qui ont reçu le baptême en son nom et qui, par ce sacrement, sont devenus frères et sœurs puissent se dénigrer, se jalouser, se battre, voire se haïr et ainsi déchirer le Corps du Christ ? Cette exigence a suscité la fondation de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens et la réconciliation de tous les baptisés. La semaine de prière est fondée sur le Christ qui, dans la grande prière avant sa Passion, a prié pour l’unité entre ses disciples, prière rapportée par l’évangile de Jean : « Que tous soient un » (Jn 17, 21). La semaine de prière est une participation à cette prière. Elle met en œuvre ce qui est fondateur de l’Église.
Aujourd’hui, la liturgie nous le donne à voir dans les tout premiers commencements : la rencontre de Jésus avec ceux qu’il appelle à devenir ses compagnons de route jusqu’à sa résurrection et qui sont montés à Jérusalem afin que vienne le Règne de Dieu : Pierre, André, Jacques et Jean. Deux points méritent attention. D’abord, les hommes appelés par Jésus sont présentés comme des frères. Ce mot est essentiel. La mission à laquelle ils consacreront leur vie a pour fondement et pour horizon la fraternité. Ensuite, Jésus dit qu’ils seront pécheurs d’hommes : ce ne sont pas des notables (prêtres, professeurs, magistrats ou autres…). Ils sont pécheurs sur le lac de Tibériade. Par leur travail, ils sont source de vie pour leurs proches ; ils seront source de vie pour les enfants de Dieu. Avec eux s’ouvre le chemin où Dieu se donne. Mais sur ce chemin, il y a encore du chemin.
Du texte de l’évangile lu aujourd’hui, je relève un mot qui revient deux fois : « Aussitôt », « tout de suite », « sans attendre »… Pourquoi cette radicalité, sinon parce qu’il y a urgence ? En effet l’unité des chrétiens est d’autant plus urgente que la situation des chrétiens dans le monde est très précaire. Pensons à nos frères chrétiens d’Orient qui supportent la persécution depuis des siècles. Si nous ne les avions pas oubliés, ils auraient sans aucun doute été épargnés. De manière exemplaire les Arméniens, mais aussi à la plus ancienne communauté chrétienne en Éthiopie… Et tant d’autres. Aussi, la prière que demande le Concile Vatican II n’est pas limitée à une semaine. Sur le chemin, il y a encore du chemin, aussi je vous rappelle le texte de la prière qui, à la célébration de toute messe, précède la communion : « Ne regarde pas nos péchés, mais la foi de ton Église ; pour que ta volonté soit faite, donne-lui toujours cette paix, et conduis-la vers l’unité parfaite. »