Homélie du 24 mai 1998 - 7e DP

Que tous soient un

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        L’Église nous propose aujourd’hui de réentendre chez saint Jean la grande prière de Jésus. Où plutôt, devrais-je dire la troisième et dernière partie de cette prière qui se développe tout au long du chapitre 17. Celle-ci est appelée sacerdotale car elle donne le sens profond du sacrifice du Christ. Lui qui vient d’accomplir un signe (celui du pain et du vin donné comme son corps et son sang): il offre et se donne lui-même par amour. Il est à la fois prêtre et victime et invite ses disciples à vivre dans l’unité, seul gage d’une véritable appartenance au Père. Jésus prie ici pour l’unité des croyants. Et l’unité n’est pas un vain mot. C’est par la révélation de l’unité entre Jésus et son Père que se réalise, au long des siècles, leur glorification. Et ceci ne peut avoir lieu que dans l’amour qui unit les disciples.

        L’unité divine est fondement de l’unité des croyants grâce à l’amour. Le mystère de l’unité dont il est ici question fait apparaître le sens de la prière de Jésus et celle du chrétien.

La prière de Jésus est unique, puisqu’elle exprime totalement ce qu’est le désir de Dieu dans l’homme. Jésus étant homme véritable, voulu par Dieu sans péché.

La prière humaine quant à elle, faîte en vérité, est celle qui demande « au nom de Jésus « , c’est-à-dire en communion avec lui. Cette prière, nous dit l’Écriture, est toujours exaucée. En effet, elle part de l’exaucement en personne. De la sorte, la prière pour l’unité surgit de l’unité du Père et du Fils déjà donnée aux hommes par Jésus. La parole qu’est Jésus fait corps avec ses disciples, et ils deviennent à leur tour, « paroles » pour leurs frères. Par leur foi en Jésus, ils lui ont donné leur parole, qui est elle-même œuvre de l’Esprit avec eux. L’Esprit qui unifie toute chose en l’amour divin, source de tout amour. La foi des disciples se présente comme un ferment de foi pour le monde. Croire, c’est percevoir que Dieu, l’invisible, s’est donné à voir en Jésus-Christ, lui qui révèle Dieu. Ainsi l’unité est la révélation du Père, comme toute la vie terrestre de Jésus l’a manifesté.

        L’unité de Dieu, l’unité en Dieu est le point de référence de l’unité des croyants entre eux « que tous soient un, de même que toi, Père, tu es en moi et moi en toi » (Jn 17, 21).

L’unité divine est bien plus que le modèle de l’unité des croyants, car c’est en eux qu’elle s’exprime réellement. Le commandement nouveau ne vient pas de l’extérieur . l’amour fraternel est le fruit de l’amour divin. Ce commandement invite donc chacun de nous à une connaissance mutuelle qui est le signe visible de l’amour que le Père et le Fils s’expriment l’un à l’autre.

« Connaître pour mieux aimer » disait saint Augustin. Connaître qui n’est pas d’abord, dans la mentalité biblique, un acte d’intelligence mais une unité d’amour. Connaissons-nous nos frères?

L’unité des croyants s’origine dans celle de Dieu, qui est unité de communion. Vivre la communion, c’est être assumé dans une unité originelle.

L’Esprit Saint est principe de connaissance et d’amour. Communier au Christ en aimant ses frères de l’amour même de Dieu, c’est aussi connaître l’Esprit de vérité.

Voir Jésus, le connaître, et en lui voir le Père, c’est vivre en communion avec lui, et ainsi avec ses frères. Jésus est présent dam les siens parce que l’Esprit habite en eux.

        L’union fraternelle est la condition indispensable de l’intimité avec Dieu et avec Jésus. Nous avons à trouver notre unité dans le courant d’amour qui relié Jésus au Père.

Notre unité ne dépend pas de nos efforts, mais si nous aspirons à l’unité et si nous nous efforçons de la réaliser, c’est parce que l’unité même de Dieu nous est donnée, dans la gloire que Jésus nous communique. La docilité à l’Esprit mené l’amour à son accomplissement. L’amour et l’unité sont accomplis dans la mesure ou nous nous laissons transformer par l’amour obéissant du Fils. Lui qui se consacre pour les siens, jusqu’à l’offrande de sa vie. L’unité des croyants entre eux est une œuvre de foi, c’est-à-dire de consentement à la révélation du Fils. Puisque la foi du disciple permet à l’amour de Dieu de demeurer en lui et lui obtient la vie éternelle.

Cette unité des disciples dans l’amour, fruit de l’unité de l’amour divin, en est aussi le vivant et rayonnant témoignage. La communion fraternelle poursuit la révélation de Jésus: « A cela tous vous reconnaîtront pour mes disciples – à cet amour que vous aurez les uns pour les autres » (Jn 13, 35). C’est la certitude d’être aimés par le Père et de vivre en présence du Fils ressuscité qui pousse les croyants à devenir les témoins en actes de leur amour commun, tel Étienne dans la première lecture. Jésus se livrant aux siens jusqu’à les faire vivre de son union avec le Père donne à son Église son dynamisme et son rayonnement. C’est l’Esprit qui par la foi, la prédication et les sacrements de l’Église, témoigne de l’amour trinitaire a travers l’engagement des chrétiens dans le monde.

        Telle est l’existence chrétienne – contempler activement, c’est-à-dire en s’engageant sans retour dans l’amour fraternel, l’amour éternel de Dieu. A ceux qui le recevront, il donnera « pouvoir de devenir enfants de Dieu », par l’Esprit. Car l’amour divin, c’est l’Esprit que Jésus envoie d’auprès du Père. Jésus ne demeure plus parmi nous à travers sa chair fragile, comme autrefois sur les routes de Galilée. Mais il demeure dans sa chair vivifiée par l’Esprit, celle qui est l’Église cheminant au long des siècles sur toutes les routes de la terre. A nous de mettre nos pas dans ceux du Christ pour vivre avec lui la gloire de notre Dieu.

 

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