Homélie du 4 novembre 2018 - 31e Dimanche du T.O.

Quels premiers commandements ?

par

fr. Timothée Lagabrielle

Quel est le premier de tous les commandements ? Un instant, faisons comme si nous n’avions pas écouté l’évangile (pour une fois, ceux qui ont eu une distraction sont les bons élèves). Faisons comme si nous n’avions pas écouté la réponse de Jésus, pour nous laisser surprendre et l’accueillir comme quelqu’un qui la découvre. Dans ce but, nous pouvons nous poser la question à nous-mêmes, et faire comme si c’était à nous qu’elle était posée : de moi-même, qu’est-ce que je réponds si on me pose cette question ?
Et la réponse n’est pas évidente, parce que la question n’est pas évidente. En effet, il y a différentes façons d’être premier. Le premier commandement, cela peut être le premier chronologiquement, ou bien celui qui est le plus fréquent. Jésus va répondre en prenant « le premier » en un troisième sens : en disant quel est — ou plutôt quels sont — les plus grands commandements. Mais ce n’est pas la seule façon d’être premier et c’est intéressant de voir ces autres premiers commandements :
*Chronologiquement*, si nous prenons toute la Bible, le premier commandement est : « Que la lumière soit » (Gn 1, 3), c’est-à-dire : « Existe ! »… Voilà déjà de quoi nourrir de belles heures de contemplation ! La première chose que Dieu veut pour nous, c’est que nous existions. Nous pourrions aussi regarder dans l’Évangile où, chronologiquement, le premier commandement est « N’aie pas peur ; sois sans crainte » (à Zacharie : Lc 1, 13).

Trouver le commandement *le plus fréquent* est plus difficile, parce qu’on ne sait pas trop jusqu’à quel point faire des regroupements quand une même idée apparaît formulée différemment… mais ce serait peut-être quelque chose comme : « Sois heureux ! » ou bien encore : « N’aie pas peur ».

J’espère que vous me pardonnez ces détours, mais ils nous permettent de voir que cette réponse n’est pas évidente, parce qu’il y a plusieurs premiers commandements. D’ailleurs, en cherchant le plus grand, Jésus n’en donne pas un seul, il en donne deux… et même trois ! Avez-vous remarqué, dans cet Évangile selon saint Marc, il n’y a pas seulement le commandement d’aimer le Seigneur et son prochain, mais il y a aussi un commandement préliminaire : « Écoute ».

Quel est le premier commandement ? D’une certaine façon, c’est « Écoute ». Écouter c’est — pourrait-on dire — un méta-commandement. Écouter c’est la condition nécessaire pour entendre le commandement divin. Écouter c’est l’attitude primordiale du croyant. C’est pour cela que c’est aussi un commandement que Dieu répète tout au long de la révélation : c’est ce que les prophètes demandent (par exemple : Am 3, 1 ; Jr 7, 2 ; Mi 1, 2…), ce que le sage des Proverbes réclame (Pr 1, 8 ; voir aussi Sg 6, 1), ce à quoi Jésus nous invite (par exemple : « Écoutez ! Voici que le semeur est sorti pour semer… » en Mc 4, 3.9).

Pourquoi commencer par écouter ? Parce que c’est le moyen d’être mis en relation. C’est par la parole que nous entrons le mieux en relation les uns avec les autres… Ceux qui perdent l’audition le savent bien : quand on a du mal à entendre, on est très isolé. On peut aussi entrer en relation par d’autres moyens de communication, mais ce sont souvent de pâles copies du dialogue qu’on fait en discutant face à face. L’écoute nous met en relation, d’ailleurs c’est extrêmement désagréable de ne pas se sentir écouté. Qui n’a jamais dit à un autre : « Tu ne m’écoutes pas ! » — ou, encore pire : « Tu ne m’écoutes jamais ! » —… et dans ce cas-là, c’est bien le signe d’une relation qui ne se noue pas.

La vie de foi, c’est entrer en relation avec Dieu, et « écouter » y est encore plus important que dans les relations humaines, car c’est le Verbe de Dieu, la Parole de Dieu, qui se donne à nous. Comment recevoir une parole sinon en écoutant ? Recevoir Jésus, recevoir la Parole de Dieu, c’est d’abord une question d’écoute. Le jour de la Transfiguration, le Père nous le dit : « Celui-ci est mon fils bien-aimé, écoutez-le ! » (Mc 9, 7).

Écouter, c’est une attitude à cultiver, une façon d’être. Pour cela, il faut ouvrir ses oreilles, ne pas rester sourd aux appels de Dieu. Cette surdité, Jésus la constate dans l’Évangile : « Ils ont des oreilles et n’entendent pas » (Mt 13, 14, citant Is 6, 9-10).
Comme dans une dictée, cette écoute attentive est nécessaire pour que ce que Dieu dit puisse s’inscrire en nous. Cette écoute n’est qu’un préliminaire, qu’une première étape. La suite de cette écoute c’est que nous agissions. Agir en accomplissant la parole entendue, c’est notre façon de bien faire cette dictée divine. Cette écoute est là pour permettre d’accomplir ces deux plus grands commandements : aimer le Seigneur de tout notre cœur, de toute notre âme, de tout notre esprit et de toute notre force, et aimer notre prochain comme nous-même.

Pour pouvoir bien écouter la Parole de Dieu et qu’elle s’imprime bien en nous, pour que cette écoute produise un bon fruit en nous, nous avons un modèle et une aide, c’est la Vierge Marie, qui en est bienheureuse parce qu’elle a éminemment réussi à écouter la Parole de Dieu et à la garder.
« Heureux ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui l’observent ! » (Lc 11, 28).

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