Homélie du 5 avril 2009 - Dimanche des Rameaux

Qu’il entre le roi de gloire!

par

fr. Élie-Pascal Épinoux

«Portes, levez vos frontons, élevez-vous, portes éternelles, qu’il entre, le roi de gloire.» Ps 23, 7
Mais où entre-t-il ce roi de gloire? Et pourquoi?

« Il entra à Jérusalem dans le Temple » ( Mc 11,11)

40 jours après sa naissance ses parents l’avaient emmené à Jérusalem pour le présenter au Seigneur dans le Temple (Lc 2, 22) et 40 jours après Noël nous avons commémoré cette première entrée dans le Temple en tenant en main des cierges bénis et allumés, première entrée et première offrande qui annonçaient celles qui vont s’accomplir en cette Sainte Semaine.

Joseph avait alors amené pour offrir en sacrifice deux jeunes colombes: une pour offrir en holocauste, totalement consumée pour le Seigneur, et l’autre pour offrir en sacrifice pour le péché dont le sang serait répandu sur l’autel (Lv 5, 7-10). Aujourd’hui c’est Jésus lui-même qui vient s’offrir, totalement consumé par son amour pour le Père et pour nous les hommes, répandant son sang pour le péché de toute l’humanité:
Sang qui récapitule et accomplit celui d’Abel, le premier mort, qui crie justice devant Dieu de toutes les morts humaines (Gn 4, 10)
Sang qui récapitule et accomplit celui d’Isaac, le premier qui librement consentit à être offert, couvrant les fautes de sa descendance à venir (Gn 22)
Demain Jésus pourra chasser les vendeurs du Temple (Mc 11, 15-17): le sacrifice des animaux n’était que répétition de celui d’Isaac là même où son père l’avait offert, et voici qu’aujourd’hui en son Fils Dieu pourvoie à l’agneau dont le sang versé une fois pour toutes sur l’autel de la Croix rachète les péchés de l’humanité tout entière. « Ceci est mon sang, le sang de l’alliance, qui va être répandu pour une multitude. » (Mc 14, 24)
Heureux les invités au festin de noce de l’Agneau et qui lors de la Sainte Cène communieront à ce sang rédempteur.

«Portes, levez vos frontons, élevez-vous, portes éternelles, qu’il entre, le roi de gloire.»
Mais où entre-t-il ce roi de gloire? Et pourquoi?

« Joseph d’Arimathie descendit Jésus, l’enveloppa dans le linceul et le déposa dans une tombe qui avait été taillée dans le roc; il roula une pierre à l’entrée du tombeau. » (Mc 15, 46)

40 jours dans le désert Jésus avait jeûné assumant la fragilité de notre chair vouée à la mort et luttant contre celui qui avait conduit Adam à la mort, et il y a 40 jours furent imposées sur nos têtes les cendres bénies: «tu es poussière et tu retourneras à la poussière» (cf. Gn 3, 19); première expérience de notre mortalité et premier combat contre l’Ennemi qui annonçaient celui qui va se livrer en cette Sainte Semaine.
Lazare, le mort de quatre jours, liés des bandelettes du péché, livré au néant de la corruption, est sorti vivant du tombeau;

Jésus le Vivant, enveloppé du linceul de nos péchés, descend dans l’abîme de notre mort et à l’instant où roule sur son corps la pierre du tombeau il brise les portes des Enfers! Par sa mort il tue la mort et à ceux qui sont dans les tombeaux il donne la vie!

Marie la sœur de Lazare, mêlant ses larmes à celles de Jésus, a compris que si son frère revient de la mort c’est parce que Jésus descend dans la mort, aussi quelques jours avant la Pâque elle le rejoint dans l’abîme du tombeau, répandant sur sa tête le nard pur dans un geste d’amour fou, onction funéraire et nuptiale à la fois. (Mc 14,3-9)

Seigneur nous sommes tous des adams pécheurs, coupés de toi, voués à retourner à la poussière et au jour du Grand Samedi nous n’aurons à t’offrir que le tombeau de notre cœur de pierre: fais-en la chambre nuptiale de ta résurrection.

«Portes, levez vos frontons, élevez-vous, portes éternelles, qu’il entre le roi de gloire.»
Mais où entre-t-il ce roi de gloire? Et pourquoi?

« Hosanna! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur! Béni soit le Royaume qui vient, de notre père David! Hosanna au plus haut des cieux! » (Mc 11, 9-10)

« Il entra à Jérusalem dans le Temple » mais cette Jérusalem de la terre n’est que l’image de «la Cité sainte, Jérusalem, qui descend du ciel de chez Dieu, avec en elle la gloire de Dieu» et dont «le Seigneur Maître-de-tout est le Temple, ainsi que l’Agneau» (Ap. 21, 10; 22). C’est dans cette Jérusalem céleste que Jésus entre dans la gloire de sa résurrection, dans cette Cité qui est la demeure de Dieu avec les hommes, où il n’y a plus ni mort, ni pleur, ni cri, ni peine. (Cf. Ap 21, 3-4) Hosanna au plus haut des cieux!

C’est pourquoi nous nous sommes rassemblés aujourd’hui, tenant en main des rameaux bénis, pour entrer dans cette église de ciment et de verre qui est la figure de la Cité sainte, de cette Jérusalem d’en haut où Dieu Notre Père veut nous rassembler dans sa gloire, tous ensemble et pour toujours: Hosanna au plus haut des cieux!
Mais nous savons que nous ne pouvons y entrer par une autre porte que Jésus-Christ lui-même, lui qui est la porte des brebis. (Jn 10, 7)
Heureux ceux qui dans la Sainte Nuit de Pâques franchiront de nouveau le seuil de cette église avec le Christ Ressuscité, tenant en main leur cierge allumé au cierge pascal, devenus eux-mêmes lumière par son offrande: au lieu des cendres de la mort c’est l’eau vive du baptême qui coulera sur leur tête faisant d’eux des vivants qui voient Dieu et ils boiront avec lui le vin nouveau dans le Royaume de Dieu. (Mc 14, 25)

En cette Sainte Nuit nous serons cette foule immense que nul ne peut dénombrer, de toute nation, race, peuple et langue; debout devant le trône et devant l’Agneau, vêtus de robes blanches, des palmes à la main, craint d’une voix puissante: «Le salut à notre Dieu, qui siège sur le trône, ainsi qu’à l’Agneau!»(Ap 7, 9-10)

Mais pour cela il nous faut d’abord passer avec le Christ par la grande épreuve et blanchir nos robes en son sang, voilà pourquoi au seuil de cette Sainte Semaine nous allons entendre le récit de la passion du Seigneur Jésus, de son offrande et de sa victoire, du chemin pour passer avec lui de la mort à la vie,de ce monde au Père. (Jn 13,1).