« Ne crains pas, Joseph, de prendre chez toi Marie ton épouse »
Non, Joseph n’est pas de trop dans le mystère de l’Incarnation. Son mariage virginal avec Marie est comme l’écrin accueillant l’Emmanuel, comme un voile enveloppant le mystère de l’Incarnation — comme le voile du Saint des saints ou encore le voile du silence qui drape un cœur mystérieusement à l’écoute de Dieu. N’est-il pas ainsi drapé de silence le cœur de Joseph dont l’Évangile ne nous rapporte aucune parole mais seulement son écoute et son obéissance à la Parole de Dieu ? Ce silence de Joseph a frappé saint Jérôme qui commente ainsi le choix de Joseph de répudier Marie en secret : « Joseph connaissant la vertu de Marie enveloppe de silence ce dont il ignorait le mystère »…
Joseph ne parle pas mais son enseignement est clair, il nous apprend par sa vie cachée à Nazareth l’humilité qui est la vraie grandeur : non la grandeur clinquante qui fait du bruit, non celle qui recherche la gloriole sous les feux des projecteurs, mais celle qui est faite de service de Dieu et du prochain, celle qui ne paraît pas forcément aux yeux des hommes mais que Dieu connaît. Joseph nous apprend la grandeur d’un travail qui peut être monotone, comme de travailler le bois dans un atelier de charpentier, mais qui est aussi joyeux et fécond parce que réalisé par amour.
N’est-ce pas intéressant de constater que Joseph, qui entretint une relation continuelle avec Jésus et Marie, nous est présenté dans l’Évangile comme silencieux ? Notre vie chrétienne, vie de relation à Jésus et Marie, a besoin de moments de silence. Dans les écrits de sœur Faustine, Jésus dit à la religieuse polonaise : « Tâche de vivre recueillie, pour que tu entendes ma voix qui est si basse que seules les âmes recueillies peuvent l’entendre. »
Silence de Joseph, mais aussi courage de Joseph. Ce courage transparait de multiple fois dans sa vie : au moment où il perçoit les premiers signes de la maternité mystérieuse de Marie ; au moment de répondre à sa vocation de père virginal du Sauveur ; à Bethleem lorsqu’il cherche un endroit pour la venue au monde de notre Dieu ; à Jérusalem où il entend qu’un glaive de douleur transpercera le cœur de Marie. Courage de Joseph lors de la fuite en Égypte ou lors de la perte de l’Enfant à Jérusalem. Silence et courage sont d’ailleurs liés : « Dans le silence et l’espérance sera votre force », nous dit le livre d’Isaïe.
Silence, force, enfin douceur. Joseph accueille chez lui avec une tendresse respectueuse Marie et l’Enfant qu’elle porte en elle, dont Dieu lui a révélé le mystère. Tendresse de Joseph qui prend soin de la vie et de l’éducation de Jésus avec Marie. Cette tendresse respectueuse n’est pas non plus sans lien avec le silence. Le silence est respect, il permet l’écoute de l’autre et la crainte filiale, l’adoration de Dieu. Il nous éloigne du tumulte de passions véhémentes. Le silence est douceur, il permet notre repos, et nous donne de savourer la beauté : celle de Dieu, celle de la vérité, celle d’une belle musique, celle d’une belle église ou d’un beau cloître (comme celui des Jacobins). Ce doux silence fait murir en nous la réflexion et les paroles pleines de bonté.
Saint Joseph, enseigne-nous comme tu as enseigné Jésus. Apprends-nous l’estime de l’humilité, du silence, de la retraite, apprends-nous a vivre en relation continuelle avec Jésus et Marie.