A peine sortis du temps de Noël, nous sommes déjà invités à nous tourner vers Pâques. De Bethléem où nous contemplions hier encore ce nouveau-né couché sur le bois de la mangeoire, nous prenons la route pour Jérusalem où l’Agneau de Dieu sera immolé sur «le bois de la croix pour le salut du monde». Le temps de l’Avent nous invitait à nous préparer, dans le recueillement, à la venue de l’Emmanuel parmi nous. Ce temps de carême nous propose de nous retirer quarante jours au désert, pour nous disposer à accueillir le Christ ressuscité. Nous sommes sans cesse en chemin, à la recherche de ce pour quoi nous sommes créés: Dieu, notre Père. Oui, «Tu nous a faits pour toi Seigneur et notre cœur est sans repos tant qu’il ne demeure en toi».
La première lecture nous donne le ton de toute la démarche du Carême: «Revenez à moi de tout votre cœur!». Claire invitation à sortir de nous-même, à se mettre en route vers Dieu. Car c’est là le sens même de la conversion: nous décentrer de nous-même pour nous centrer sur Dieu. La vraie conversion exige un détachement de tout ce qui retient loin de Dieu. Mais l’initiative vient de Dieu qui «nous adresse inlassablement un appel » en son Fils Jésus-Christ. «Laissez-vous réconcilier avec Dieu!». Oui, «Revenez au Seigneur votre Dieu, car il est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour». C’est l’Amour même qui nous convoque. Cet appel, cette convocation nous concerne tous sans exception. Osons avancer avec confiance vers le Dieu qui fait grâce. Car, «c’est maintenant le moment favorable, c’est maintenant le jour du salut». Mais pour recevoir cette grâce, il nous faut prendre des moyens adéquats.
Dans l’évangile, Jésus a rappelé les trois axes de la piété juive: la prière, l’aumône et le jeûne. Trois axes qui disposent à recevoir la grâce. Jésus les reprend non sans les avoir purifiés. Car celui qui «se donne en représentation» recevra des félicitations humaines mais non divines. Or, l’attitude que réclame Jésus c’est la discrétion, c’est-à-dire un abandon filial à Dieu, car, Lui seul peut apprécier la valeur du geste posé. Et «Ton Père qui voit dans le secret … lui qui sonde les cœurs et les reins, te le rendra».
Mes frères, Dieu veut que notre intention soit droite; que notre manière de faire l’aumône, de jeûner, de prier, soit «discrète». C’est l’intimité profonde avec Dieu qui compte. Et cela explique le symbolisme du rite de l’imposition des cendres. En effet, ce rite rappelle notre condition humaine. Il révèle que notre existence risque de n’être qu’un souffle qui passe, si nous ne la fondons pas sur le Christ: «Tu es poussière et tu retourneras en poussière»… C’est pourquoi Jésus proclame: «Convertissez-vous et croyez à l’évangile» afin que nous choisissions la vie.
Frères et sœurs, nous sommes invités à passer d’une attitude superficielle à l’intégration en profondeur; de la simulation dans des relations fausses et stériles, au dialogue personnel avec «notre Père, qui est présent dans le secret». Dieu nous demande de dialoguer avec lui dans une relation de personne à personne. Notre ascèse chrétienne durant ces quarante jours c’est d’entrer dans une relation filiale toujours plus authentique avec Dieu, notre Père. Il nous attend patiemment au seuil de nos décisions pour «nous combler de ses bienfaits». Alors, levons-nous! Partons d’ici! Allons à la rencontre du Seigneur! Car l’heure est venue de nous réconcilier avec Lui.