Homélie du 20 juillet 2003 - 16e DO

Avec les Apôtres, menons à Jésus, Pasteur plein de sollicitude

par

fr. Bernard Autran

Les Apôtres reviennent de leur première mission. Elle a si bien réussi que beaucoup de gens veulent s’approcher de Jésus. Ce sera un tournant dans son ministère en Galilée. Pour eux Il va multiplier les pains, puis expliquer qu’Il est Le Pain de Vie: ce sera notre méditation jusque vers la fin août.

Il arrive souvent que le travail au service de l’Évangile soit décevant. Ce qu’il faut alors annoncer contredit l’égoïsme. Ainsi, comme Jésus Lui-même n’a souvent pas été accueilli, il est fatal qu’il en soit de même pour ses envoyés. C’est alors pour eux une manière de vivre dans l’obscurité la Foi en la Puissance de Sa Croix dont ils partagent l’épreuve. Et pourtant, sans qu’ils puissent toujours s’en rendre compte, ce qu’ils vivent alors est la ferme Espérance: le labeur qui leur est confié portera réellement un grand Fruit.

Mais souvent, heureusement, L’Esprit Saint ouvre le cœur des auditeurs comme en cette mission. Il le fera quand à la Pentecôte Pierre et les Apôtres annonceront la Résurrection de Jésus. Pensons aussi, plus près de nous entre autres, au succès des JMJ. Beaucoup d’entre nous ne l’ont pas vécu, mais je ne suis pas près d’oublier l’extraordinaire Pâque de 1973 en notre couvent de Toulouse ou telle expérience de prière avec des jeunes. Cela fait partie des Signes du Royaume de Dieu. C’est grâce à eux que La Bonne nouvelle peut être proposée à ceux qui, librement, s’y ouvriront et la laisseront bouleverser leur vie.

Mais ce service des frères pour leur révéler le sens de leur vie avec Jésus est un engagement très profond. S’il est épuisant lorsqu’on semble travailler pour rien, il peut l’être aussi quand dans l’enthousiasme, l’exigence des gens se fait grande. L’histoire de l’Église fourmille d’exemples de disciples qui, se consacrant à la Prière, au service de la Parole ou aux secours aux pauvres ou aux malades, se sont donnés avec une force, une patience, un efficacité souvent au delà de l’humain!

N’oublions pourtant pas la réalité! Sauf don tout particulier de l’Esprit Saint, les forces humaines ont des limites. Si Jésus a demandé à Ses Apôtres de venir à l’écart pour prendre quelque peu de repos, c’est une règle de sagesse dont il faut toujours tenir compte. Ce n’est pas pour pouvoir prendre du bon temps en vacances qu’on travaille toute l’année. Mais, il faut savoir s’arrêter, prendre du repos, refaire ses forces pour une bonne santé physique et psychique, être ainsi capable de remplir ses responsabilités. C’est une occasion de mieux vivre la liberté et se mettre à sa vraie place en rendant grâces! Profitons de son invitation pour examiner la manière dont nous nous reposons en une vie qui soit vraiment donnée au Seigneur et à nos frères.

Mais la suite du récit nous révèle un aspect profond de Jésus: les gens surviennent et L’obligent à changer son projet. Il ne sait pas tout d’avance! D’ailleurs, Il l’affirme nettement quelquefois. Bien sûr, Fils de Dieu, tout Lui est découvert, mais sa psychologie humaine ne s’ouvrira à cette totalité qu’à Sa Résurrection. Sinon, Il jouerait à l’homme, mais ne vivrait pas notre condition. Au contraire, s’Il est doué d’une très profonde connaissance prophétique, Il vit comme nous, ne sait pas tout, se sert de ses facultés d’esprit et de cœur pour apprendre, s’adapter à la situation des gens, répondre à leurs besoins en diverses circonstances.

L’endroit désert où Il a voulu faire se reposer les siens ne devait pas être bien loin. Ils s’y sont rendus en barque, mais, par terre, les gens les y ont précédés! Il les trouve comme des brebis sans berger. Il se consacre longuement à les éclairer de Sa Parole. Depuis longtemps, Le Seigneur voulait confier ce soin à des hommes. Mais si certains s’étaient bien acquittés de ce service, beaucoup n’avaient pensé qu’à eux. Et, pour se prémunir des influences païennes comme pour assurer une meilleure fidélité, mauvais bergers, ils avaient multiplié des prescriptions auxquelles ne pouvaient pas se soumettre les pauvres gens qu’il méprisaient. Alors Jésus réalise ce qui avait été promis par l’intermédiaire de Jérémie, Il Se fait leur Vrai Berger, leur parle longuement.

Le récit ne nous dévoile pas le contenu de cet enseignement. C’est à travers tout l’Évangile qu’il nous faut nous en faire une idée. Ce que nous venons de lire en l’Épître de St Paul au Éphésiens peut nous aider. Il parle du mur que Le Christ a fait tomber: ce mur séparait les croyants qui venaient du Judaïsme et les anciens païens. Mais n’en fait-Il pas aussi tomber aussi un autre? ces pauvres gens, croyants, sont des juifs consciencieux, mais ils sont tenus à l’écart par les champions de l’observance qui les méprisent. À eux Il annonce la Paix avec Dieu, cette Paix qu’Il offre non comme une récompense, un salaire dû pour des actions extérieures, mais réponse à la Foi en laquelle on Le reçoit, Envoyé du Père qui les aime!

Inspirons-nous de son attitude. En vacances, essayons de récupérer, de prendre un repos salutaire. Mais, selon la formule, ne « bronzons pas idiot »! Respirons, admirons la nature en rendant grâces. Prenons le temps de nous nourrir de l’Écriture, d’en prolonger la méditation dans la Prière. Faisons-en, si possible, une profonde rencontre avec Le Seigneur, richesse suprême! Mais surtout, gardons yeux et cœur ouverts. Si nous avons la joie de vivre la Foi, c’est que certains, éveillés, ont prolongé pour nous l’œuvre de Pasteur de Jésus. Que Son Esprit fasse habiter en nous aussi Sa Sollicitude, nous ouvre à ceux qui nous entourent et ceux qu’Il mettra sur notre chemin! Pour les mener à Lui, sachons changer nos projets! Quelle Joie s’il nous aura ainsi été donné de faire tomber des murs, de prolonger Son œuvre d’Amour! Nos vacances en seront illuminées!