Homélie du 18 juin 2017 - Dimanche du Saint-Sacrement du Corps et du Sang de Jésus-Christ

Le pain des anges fait pain des enfants

par

fr. Nicolas-Jean Porret

[à l’adresse des enfants qui font leur première communion ce dimanche du Saint-Sacrement]

Les enfants, je vous ai demandé l’autre jour si vous aimiez la viande, les légumes et surtout le pain. Vous m’avez dit “oui” à tout ça (peut-être un peu moins pour les légumes).
Mais finalement voilà qui tombe bien car Jésus nous donne son corps, sa chair, comme du pain.

Oui, incroyable, Jésus nous dit qu’il est du pain. Plutôt LE pain, le pain ultime. Mieux que le pain-bio, que le pain complet, que le pain du meilleur boulanger de Toulouse, il est le pain supersubstantiel. Si vous voulez, le pain “bio véritable” qui nourrit pour la vie éternelle  “Moi je suis le pain, le vivant”. Incroyable ? pourtant c’est Jésus qui le dit… lui, laSagesse éternelle du Père, par qui le monde fut créé.

Vous, les enfants, bien sûr vous n’êtes pas du pain. Mais êtes-vous vivants ? Au catéchisme, on dit parfois que vous êtes vivants, très vivants… “trop” vivants (au sens de trop remuants)?

Entendons-nous bien : on peut être vivant, en plusieurs sens, de plusieurs manières. J’en vois au moins trois
1. on peut être vivant en son corps… de fait, parfois remuant.
2. on peut être vivant en son âme : chaque âme est immortelle, car c’est Dieu qui l’a créée, à son image, en vue de la vie éternelle. Mais notre âme est faible, ou plutôt affaiblie, blessée depuis la faute originelle d’Ève et Adam, incapable toute seule d’aller jusqu’à Dieu.
3. on peut être vivant enfin de la vie renouvelée du baptême au nom de Jésus. Si vous êtes là aujourd’hui pour votre première communion c’est que vous avez reçu ce trésor du baptême : une vie plus que précieuse, qui nous ouvre assurément le chemin du Ciel pour parvenir jusqu’à Dieu qui a fait notre âme pour lui.

Un tel trésor — le baptême au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit — est déposé en nos corps comme dans des vases d’argile, bien fragiles. Certes, l’or de la vie trinitaire est inaltérable. Mais l’oubli et le péché souvent masquent son scintillement dans nos âmes de baptisés.

C’est pourquoi Jésus — qui a déjà fait la folie de se plonger dans notre humanité jusqu’à la mort et la résurrection —, ajoute une seconde folie : il nous donne sa vie comme du pain. Un pain aussi simple et fondamental que le pain quotidien, mais un pain vivant, vivifiant, pour nourrir la vie du baptême en nous.

Voici ce que dit Jésus, au centre du discours du Pain de Vie : “Comme moi je vis par le Père, ainsi qui me mange vivra par moi” (Jn 6, 57).
Whaoo ! Manger Jésus… vivre par lui… comme il vit par le Père ! Quel mystère !

Sous l’apparence extérieure du pain, c’est vraiment son corps vivant (mais pas remuant) ; c’est vraiment sa vie qui vient couler en nous (comme le sang qui irrigue nos corps) ; c’est son âme vivante et remplie de la sagesse éternelle du Père qui nous fortifie et modèle sa ressemblance en nous. Enfin c’est sa divinité qui nous transforme et nous prépare à être les convives du Banquet céleste.

Peut-être cela nous intimide. Pensez donc!  Jésus se donne comme une bouchée de pain quotidien mais supersubstantiel… Et pourtant, s’il l’a voulu, c’est pour notre bien. Alors prenons humblement conscience de l’abaissement de Dieu ; émerveillons-nous d’un tel amour.

Tout à l’heure vous lui lancerez des pétales de roses, mais dès à présent offrez-lui vos cœurs  en hommage pour lui, en hommage avec lui au Père qui a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique. Par la foi, le pain des anges devient pain des enfants promis au Royaume.